Le masculin l’emporte sur le féminin en orthographe. Cette différence peut être effacée par le langage épicène (langage non sexiste). Différentes règles d’écriture s’appliquent, de la simple reformulation au néologisme, en passant par la parenthèse, le trait d’union ou le doublet intégral. Vous trouvez ces formulations surprenantes ou obscures ? Lisez la suite, tout s’éclaircira.
Il existe des méthodes pour féminiser ses écrits tout en conservant une belle grammaire. La langue est le reflet de l’évolution de la société, de ses traditions, de son organisation. Elle représente les personnes qui la parlent. Le français, comme les autres langues romanes, possède deux genres grammaticaux : le féminin et le masculin. Cela correspond aux sexes féminin et masculin quand on parle d’êtres vivants sexués. Dans Des mots à la pensée, Damourette et Pichon affirment (en 1927) que genre grammatical et genre sexuel se confondent au point de donner un sexe aux choses.
La littérature, l’histoire et l’art célèbrent moins les figures féminines. On peut proposer un langage sans distinction de genre pour promouvoir la mixité professionnelle.
Epicène : une définition
Un mot épicène a la même forme au masculin et au féminin ou qui peut désigner un mâle ou une femelle indifféremment. Il ne fait pas de distinction de genre.
Exemples de mots épicènes : perdrix, papillon, couche-tard, certains prénoms (Dominique, Camille, Sascha, Cheyenne, Ariel, Muriel
On peut présenter sur une échelle d’intensité croissante différentes propositions :
Langage épicène : gradations
Orthographes possibles dans le langage épicène
On peut voir différents « niveaux » de lutte contre le sexisme dans le langage selon la conviction et les idées qu’on y met. Dans ce domaine comme dans les autres, il existe une gradation qui va du modéré à l’extrémisme.
L’indifférence au langage épicène
Si on n’attache aucune importance au langage épicène, on écrit toujours « il pleut », « les lycéens », « les gens sont heureux », « les hommes politiques » ou encore « l’élection du président » ou « les droits de l’homme » et cela ne vous a jamais dérangé (dérangée ?). Ceci considère la langue française comme un patrimoine historique et culturel : le genre neutre est représente par le masculin. C’est une particularité du français et il n’y a peut-être même pas d’intérêt à en parler. Le langage épicène, A quoi bon ?
Langage épicène : reformulation
On peut utiliser d’autres mots pour parvenir à un langage épicène. Pour éviter les conflits de genre, on peut choisir des mots qui n’ont pas de distinction de genre. Voici des exemples :
- les hommes politiques -> les personnalités politiques
- l’homme -> la personne
- Né le -> date de naissance
- le handicapé -> la personne en situation de handicap
- le juge -> le tribunal (l’autorité plutôt que la personne)
- les pompiers -> le service du feu
- le directeur -> la direction (même si « la direction » peut désigner un collectif plus étendu)
- les enseignants -> le corps enseignant
- les techniciens -> l’équipe technique
- les citoyens -> les personnes de nationalité…
- les droits de l’homme -> les droits humains ou droits de la personne
La féminisation de l’article
On peut simplement mettre le mot au féminin en ne changeant pas l’orthographe mais seulement l’article. Cela peut éviter d’utiliser des substantifs non reconnus. Exemples :
- une ministre
- une notaire
- une ingénieur
- une chef
Les parenthèses
Le e du féminin est ajouté entre parenthèse. Symboliquement, le féminin est mis entre parenthèse et peut être perçu comme d’importance moindre. Exemple :
- l’assistant(e)
Le trait d’union –
Langage épicène, quand tu nous tiens ! Pour prendre en compte de façon plus équitable le genre masculin et le genre féminin, on peut utiliser un trait d’union entre le mot et la marque du féminin, ainsi que celle du pluriel si elle est présente. Cela a l’avantage de rester lisible, de ne pas trop alourdir la lecture du texte et d’être facile à taper au clavier.
Quelques exemples de trait d’union dans la langage épicène : l’étudiant-e est sérieux-se- les député-e-s- les gens sont intelligent-e-s
Ce trait d’union utilise aussi la symbolique même du trait d’union et de l’union.
La barre /
La marque du féminin est séparée du mot par une barre. Ami/e/s féministes, vous constaterez que cette barre crée justement une séparation avec le mot. Exemples :
- les éducateurs/trices
- un/e magasinier/ère
- vous serez formé/e
- les gens sont heureux/heureuses
Le point médian ·
Plus discret à la lecture que le trait d’union, le point médian s’utilise de la même façon :
- les lycéen·ne·s sont félicité·e·s
- vous serez formé·e
- chacun·e se sent considéré·e
Pour écrire un point médian au clavier, il faut appuyer sur la touche ALT, laisser la touche enfoncée, taper « 250 » puis relâcher la touche ALT. Le point médian fait partie des caractères spéciaux.
Le point .
Plus simple et plus rapide à taper que le point médian, le point est aussi discret à la lecture d’un texte mais peut prêter à confusion. A la différence d’un point de fin de phrase, il n’y a pas d’espace après ce point ni de majuscule.
- les lycéen.ne.s sont félicité.e.s
- vous serez formé.e
- les militant.e.s féministes
Le doublet intégral
Le doublet intégral consiste à reprendre entièrement la forme au féminin. Le doublet intégral alourdit considérablement la lecture d’un texte, rend le texte moins percutant et moins clair. Quelques exemples :
- « L’employé ou l’employée devra toujours… »
- « Le ou la responsable du service… »
- « Le formateur ou la formatrice prend soin… »
Le doublet intégral est souvent contre-productif.
Le néologisme
Pour aller encore plus loin dans la lutte contre l’« invisibilisation » du genre féminin, on peut créer de nouveaux mots qui sont un mélange de la forme masculine et de la forme féminine :
« ils ou elles » deviennent « iels », « illes », « elli » ou « yels ».
Cela peut évoquer un mélange subtil, à l’image du mouvement queer pour le genre humain. Les adjectifs peuvent alors prendre une nouvelle orthographe (néologismes). On ne parle plus de « professionnel-le » mais de « professionnèle ». Notez que cette orthographe est identique à « fidèle », qui est évidemment sans distinction de genre.
Lorsqu’on parle des « gens » en général, on pourra même tenter un singulier ou pluriel « iel.s ». Exemple :
« iel.s arrive.nt tôt le matin. »
Ces tentatives de nouvelles orthographes tentent de déconstruire le sexisme caché dans le langage même. Le langage épicène peut entraîner des lourdeurs d’écriture et une moins bonne compréhension du texte. Les amateurs de poésie et du français en général pourront préférer la langue au féminin. Dans ce cas, on peut tenter une simple prise de conscience formulée avant le texte (écrit au neutre, donc au masculin) :
Mot de la fin
Le langage non sexiste apporte une nouvelle couche à la grammaire française. Pour celles et ceux qui estiment que le langage forme la pensée, il est intéressant d’utiliser l’une ou l’autre de ces règles d’écriture pour proposer des idées nouvelles, faire prendre conscience d’un sexisme discret mais présent ou simplement susciter l’étonnement. Avez-vous été séduit.e par cet article ? Ou séduit-e ? A vous d’écrire…
Gradation dans le langage épicène : exemples
Références
La théorie du genre : définition
https://www.unige.ch/rectorat/egalite/ancrage/epicene/
https://www.unige.ch/rectorat/egalite/files/9414/0353/2732/charte_epicene_Chancelerie_guide_formulation_non_sexiste.pdf
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