L’électronique industrielle n’a rien à voir avec les réalisations maison. En effet, les procédés de fabrication sont très différents et les exigences sont nombreuses par rapport aux normes : sécurité, robustesse, fiabilité. Le métier d’ingénieur en électronique contient certes de la conception électronique, mais bien d’autres aspects que le bricoleur ne connaît pas : approvisionnement, tests de robustesse normatifs, validation, industrialisation, gestion de projet…
Voici donc les étapes de la conception de produits industriels en électronique.
Cahier des charges du futur produit
Une première étape de la conception de produits industriels, c’est le cahier des charges.
En entreprise, c’est souvent le service marketing qui définit un « cahier des charges marketing ». Il s’agit de l’ensemble des fonctions et performances auxquelles le produit électronique devra répondre. Souvent, la difficulté technique n’est pas prise en compte par le marketing ! Il y a aussi la conformité aux normes industrielles et des tests internes à l’entreprise : ces tests sont souvent plus sévères que les normes pour garantir une certaine marge. La conformité à des normes sévères joue aussi comme… argument de vente par rapport aux concurrents !
L’intégration avec le châssis mécanique est de première importance pour l’esthétique : il faut embellir le produit. La conception électronique prend donc en compte les contraintes mécaniques : emplacement des boutons, des afficheurs, des câbles dans l’appareil (en particulier dans le cas d’automates).
Conception électronique : simulations
Pour les passionnées d’électronique (eh oui, il en existe encore en entreprise !), c’est sans doute la partie la plus intéressante. Il s’agit réellement de concevoir une fonction électronique ou d’organiser un ensemble de schémas élémentaires (déjà existantes) pour élaborer de nouvelles fonctions. Les notes d’applications (Application note, Design idea) des fabricants sont utiles.
Simulation d’un circuit électronique avec un logiciel de simulation
L’ingénieur en électronique utilise souvent les logiciels de simulation électronique : Spice, Orcad, LTSpice (gratuit !), etc. Il pourra passer du temps à faire des simulations de son tout nouveau schéma en cours de conception. Connaître les limites du logiciel est utile pour juger la validité des résultats. Par exemple, la résolution en temps (durée du pas de simulation) et la précision des modèles des composants jouent un grand rôle dans des analyses poussées. Le circuit imprimé futur présentera des éléments parasites qui pourront beaucoup jouer par rapport à la simulation sur ordinateur (capacités et inductances parasites, dispersion entre plusieurs composants de référence identique). La température doit aussi être prise en compte, ainsi que les variations de tension d’alimentation, les tolérances pire cas, etc. Il est plus difficile de prédire le vieillissement des composants. Un produit industriel peut fonctionner 24h/24 et vieillira…
La conception électronique doit en plus tenir compte d’un « premier défaut » : que se passe-t-il si UN composant électronique claque sur la carte ? En tous les cas, il ne doit jamais y avoir danger pour l’utilisateur lorsque LE composant a claqué (risque d’électrocution, mouvements d’automate incontrôlés, propation du feu). Le produit n’est plus tenu de fonctionner : il doit seulement rester non dangereux.
Conception électronique : maquette (facultative)
Uniquement destinées au bureau d’études, des maquettes peuvent être réalisées pour vérifier le bon fonctionnement en pratique des simulations électroniques. Les distances d’isolation, le placement des composants, la qualité de fabrication n’interviennent pas.
Phase de maquette dans la conception de produits industriels
Montage électronique à tester…
Exemples de maquettes électroniques
Seul l’aspect fonctionnel du produit est testé (« est-ce que ça fait ce que je veux ? »). Cette partie du métier peut ressembler au bricoleur dans son garage mais occupe moins de 10% du temps total sur un projet industriel. Les grosses maquettes sont souvent réalisées par des techniciens.
Paillasse destinée aux réalisations de maquette, aux tests, aux réparations…
Composants électroniques traditionnels pour les maquettes des bureaux d’études
Choix des composants
La conception électronique doit tenir compte des composants homologués disponibles dans l’entreprise. Pour adopter un nouveau composant, il faut en effet le trouver à prix raisonnable chez plusieurs fabricants différents (au moins deux en général), commander des échantillons, les recevoir et les tester pour valider leur bon fonctionnement.
Nomenclature : liste des composants électroniques
Une gestion de stock élaborée est nécessaire. Des logiciels spécialisés tels que SAP sont très utilisés. On y voit entre autres le prix, la validité, l’interdiction et l’obsolescence des composants.
Relais, condensateurs et varistances (vue plus ou moins artistique ;-) )
Schéma
Une fois la conception mise au point, un schéma doit être réalisé sur un logiciel approprié qui sera utilisé pour le routage.
Exemple de schéma sous CR5000
Routage
Des entreprises sous-traitantes sont spécialisées en routage : elles créent des fichiers spécifiques contenant le routage complet du circuit imprimé à partir du schéma. En tous les cas sont définis à ce stade-là : contour du circuit imprimé, pistes, sérigraphie, fraisages et perçages, processus de fabrication (refusion + vague, double refusion, etc…).
Il est utile de prévoir des composants supplémentaires normalement non montés pour pallier un problème prévisible (CEM, filtrage, etc).
Routage d’une carte électronique
Le routage doit placer un point de test à chaque nœud du circuit. Chaque carte électronique sera ensuite testée par un testeur automatique (lit à clous, etc…) développé de façon spécifique pour une carte électronique.
Les ingénieurs des bureaux d’études peuvent être en contact étroit avec l’entreprise de routage pour des zones critiques : pistes bruitées, signaux sensibles, CEM, isolation à respecter entre deux zones, etc… Des échanges téléphoniques ont souvent lieu en phase de routage.
Des techniciens en électronique spécialisés en routage peuvent aussi travailler dans l’entreprise. Dans ce cas, le routage n’est pas sous-traité, à moins de besoins urgents sur plusieurs projets en même temps ! Il y a un compromis à trouver entre le surcoût et les délais supplémentaires.
Circuit imprimé et prix
D’autres entreprises sont spécialisées en réalisation de circuits imprimés. Elles utilisent les fichiers de routage pour réaliser les circuits imprimés à échelle industrielle (1000 à 100 000 par an typiquement). La précision typique des circuits imprimés industriels est de 0.1 à 0.2mm.
Le montage des composants CMS et traversants se fait selon les procédés de refusion et vague. Tous les composants ne peuvent pas passer à la vague ou en double refusion et doivent donc être montés après, en reprise manuelle (connecteurs en plastiques, composants sensibles à la chaleur).
Le prix d’une reprise manuelle est bien plus élevé que la pose industrielle d’un composant. Une résistance CMS est souvent moins chère que sa pose !
Exemple industriel :
– pose de résistance 0402 : 1 centime
– prix de la résistance 0402 : 0,05 centime d’euro (pour 5000 pièces)
– reprise manuelle : 5 à 10 centimes
– prix de la machine à poser les CMS : 800 000 euros (le prix d’une belle maison…)
Machine de montage industriel de composants CMS
On peut aussi considérer que la pose des composants représente 50% du prix total des éléments séparés (circuit non équipé + composants)
Exemple industriel :
– prix du circuit imprimé non équipé + composants : 20 euros
– prix du circuit imprimé équipé : 30 euros
– prix catalogue du produit fini : 200 à 1000 euros
N’oubliez pas le prix de l’assemblage mécanique et du boitier, des tests… et le prix catalogue est souvent négociable.
Circuit imprimé « nu »
Circuit imprimé en cours de montage : collage et placement d’une partie des CMS
Circuit imprimé « équipé » et verni (observez l’aspect brillant)
Reprise manuelle
Certains composants (connecteurs, composants sensibles à la chaleur) ne supportent pas l’assemblage industriel du procédé refusion ou vague. Ils doivent être montés et soudés à la main par des opérateurs (en fait, surtout des opératrices) sur le circuit équipé de ses composants.
Reprise manuelle en atelier
Travail soigné de soudures de fils
Une reprise manuelle se repère immédiatement sur une carte électronique industrielle (présence de flux de soudure, texture différente de l’étain). C’est une opération plus coûteuse qu’un assemblage industriel.
Conception de produits industriels : phase prototype
L’entreprise qui sous-traite la fabrication de ses circuits imprimés demande souvent une dizaine de cartes assemblées (prototypes) pour y faire des tests « grandeur nature ». Le routage étant en principe le bon (contrairement à la maquette), il est possible de tester le vrai fonctionnement du circuit électronique, son immunité CEM, ses émissions conduites, son intégration dans un châssis mécanique, l’échauffement des composants, la facilité à l’assemblage industriel en production. La qualité de fabrication est aussi vérifiée visuellement et électriquement : voir lien ci dessous pour un contrôle visuel.
Soudure de composant électronique : bonne réalisation
Soudure de composant électronique : mauvaise réalisation
Le prototype va souvent être beaucoup modifié suite aux tests et un nouveau routage est souvent nécessaire. Le prototype sert à être « charcuté », contrairement aux échantillons industriels.
Prototype modifié où sont montés à la main des CMS de taille 0402 (1 x 0.5 mm) sur la tranche !
Echantillons industriels
Plutôt destinés à être montés dans un produit fini, ils ne doivent en principe plus être modifiés. Ils sont testés en robustesse (endurance, températures extrêmes, vieillissement accéléré, enceinte climatique, etc…).
L’échantillon doit être représentatif de la série.
Il est toutefois encore temps de modifier des valeurs de composants sans changer de routage (et donc d’empreinte de composant). Il est utile d’avoir prévu de placer un petit condensateur ici ou là…
Industrialisation et méthodes
Tant pour l’électronique que la mécanique, l’industrialisation consiste à améliorer les prix de revient et optimiser les coûts de fonctionnement pour renforcer la compétitivité. Pour un circuit électronique, cela passe par l’utilisation de connecteurs avec détrompeur, des couleurs bien visibles pour les opérateurs, des vis faciles d’accès, un câblage facile et fiable, un assemblage facile (guidage mécanique des pièces), limiter le nombre de reprises manuelles, tenir compte des procédés industriels d’assemblage…
Exemple : Les connexions par fils dénudés sont évidemment des reprises manuelles sur des cartes assemblées.
Procédé de soudure défectueux (présence d’étain indésirable)
Il est important aussi de partager le savoir faire et les pratiques si elles permettent une meilleure productivité.
L’industrialisation s’oppose à la réalisation artisanale.
Exemple de carte d’alimentation industrielle
Tests et validation
Les tests fonctionnels sont les plus évidents à faire : vérifier que le produit fait bien ce qu’on veut. Mais de nombreux autres tests existent en industrie : émissions conduites et rayonnées (CEM), transitoires rapides (salves de signaux à 4kV et 5kHz par couplage capacitif), vieillissement accéléré en étuve (une température élevée accélère le vieillissement des composants électronique), robustesse en température (-20°C à +70°C par exemple), ondes de choc électriques simulant des impacts indirects de foudre, tests de défaut, courts-circuits, etc.
Un testeur automatique est développé pour le circuit. Il peut s’agir d’un lit à clous qui sert d’interface entre le circuit et le logiciel conçu pour le circuit. Chaque clou du lit vient toucher un point de test de la carte.
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Interface de test : lit à clous
Chaque composant est ainsi testé et sa mesure doit se trouver dans une fourchette convenable (tension mesurée, valeur de résistance, capacité, etc…). Pour les circuits intégrés plus complexes, le testeur peut placer une plaque métallique sur le composant et ainsi, par mesure capacitive, détecter sa signature…
Documentation
L’ingénieur en électronique doit rédiger des rapports clairs et souvent en suivant des modèles informatiques internes à l’entreprise. La créativité littéraire n’est pas vraiment nécessaire ! Les résultats de simulation et les choix de composants y apparaissent normalement sans faute d’orthographe…
Pour l’entreprise, la documentation sert de capital intellectuel. On la consulte si un produit présente un problème longtemps après sa conception. Les concepteurs ne sont peut-être plus là ou ne se souviennent plus en détail 5 ans après.
Un stagiaire ou un prestataire de service débutera en lisant les rapports existants, papier ou informatisés.
Anciens documents papier
Présérie et série industrielle
Ca y est, la production industrielle de milliers de cartes électroniques par an peut commencer : c’est la série. L’économie d’échelle et des années de négociation avec les fabricants de cartes permettent souvent de réduire beaucoup le prix d’une carte. Un nouveau projet ne bénéficie pas encore de cet avantage financier.
Produits électroniques industriels (ensemble de 16 cartes identiques à détacher)
Gestion et chef de projet
Des nouvelles contraintes s’ajoutent parfois (ou même souvent) au cours de la vie d’un produit industriel. Une norme peut devenir plus sévère, le marketing peut demander une option (afficheur, sauvegarde de données, consommation réduite d’énergie, etc…), des retours client peuvent témoigner d’une fragilité d’une fonction électronique ou de contrefaçons sur des composants (connue sur les transistors de puissance).
Le chef de projet électronique encadre des personnes (ingénieurs et techniciens) et les oriente dans leurs travaux et recherches. Il gère les plannings en fonction du routage, les délais des sous-traitants, les développements des autres servies (logiciel, mécanique).
Par exemple, l’ingénieur peut écrire ses rapports pendant que le routage et la réalisation des premières cartes sont en cours (2 mois environ).
Organisation visuelle décrite par post-its
Le chef de projet s’adapte aussi à la disponibilité des locaux et des matériels utilisés par d’autres projets en cours. Il utilise également ses connaissances en électronique, mais aussi en mécanique, en logiciel et dans les domaines qui interviennent dans son projet. Il délègue son travail, assure un suivi, et doit savoir faire confiance.
Salaire d’un ingénieur développement électronique
Le salaire brut annuel d’un ingénieur développement électronique débutant va de 28 à 32 k€. Après 5 ans d’expérience, il atteint 30 à 40 k€. En fin de carrière, l’ingénieur développement électronique peut espérer gagner près de 80 k€.
« L’argent, ça va, ça vient. Mais quand ça vient, ça va. »
Horaires de travail en bureau d’études
Les ingénieurs sont souvent au « forfait cadre » : leur temps de travail est compté à la journée et non à l’heure avec une pointeuse. A titre indicatif, une journée typique peut être 9h-18h avec 45 minutes de pause-cantine pour déjeuner. Il y a environ 40 heures par semaine mais parfois 45 ou 50 si des urgences l’imposent ! Des déplacements de quelques jours chez des sous-traitants sont aussi possibles quelques fois par an.
Bureau d’études
Bureau d’études électroniques
Produits industriels et nouvelles solutions
Plutôt que de parler de « produit » qui évoque un matériel industriel standardisé, on préfère employer le terme de « solution », plus abstrait, plus en vogue, et surtout plus personnalisé par rapport au client. Un client délaisse le « produit » et préfère une « solution » – aussi technique et matérielle soit-elle – en réponse à son besoin particulier. C’est aussi un effet de mode.
Conclusion sur la conception de produits industriels en électronique
Les produits électroniques industriels ne demandent pas que de la conception, loin de là ! Le bureau d’études électronique se penche très largement sur des exigences liées aux normes, aux procédés industriels et à la commercialisation des produits. La sécurité et la fiabilité d’un produit sont essentielles tout en garantissant le meilleur prix.
Cartes électroniques produites à la chaîne…
bonjour je suis hichem de Tunisie j’ai 30 ans je travail comme technicien supérieur en automatisme je fait la maintenance des armoires électrique de commande pour les pompes émergés et les station de concassage des pierres aussi le câblage des armoires de AàZ je cherche pour une formation rapide sur les automates programmables aussi pour les démarreurs progressives et finalement sur les régulateurs de voltages automatique pour les groupe électrogène merci d’avance
« L’industrialisation s’oppose à la réalisation artisanale. » Hélas oui, à moins de faire des produits « de niche » en petites séries, Nicolas CASTEL
Bonjour à tous,
Je suis mondher Gharsallaoui, technicien supérieur en statistique et informatique , j’ai 6 ans d’expériences en électronique dans une société italienne , mon poste de travail est chef de groupe : conducteur ligne CMS ,j’ai une bonne expérience sur les: – sérigraphies : imprimer les circuits avec étain ou colla
– Machine de montage industriel de composants CMS
– passage des circuit avant et après four avec contrôle qualité.