Comment estimer la puissance mécanique prélevée par le moteur en situation de frein moteur ? En frein moteur, aucun carburant n’arrive au moteur. C’est le véhicule qui entraîne la rotation du moteur. Le moteur prélève doncune puissance mécanique à la voiture. Il est entraîné par la vitesse de la voiture et tend ainsi à la freiner.
Les frottements de la voiture
Les frottements de la voiture sont constitués des frottements solides et aérodynamiques. Lorsque la pédale d’accélérateur est relâchée, le moteur est entraîné par la voiture, l’injection de carburant est totalement coupée. Ce qui fait tourner le moteur, ce n’est donc plus la combustion interne du carburant, mais simplement, à travers l’embrayage et la boite de vitesse, la rotation des roues.
Lorsqu’on relâche la pédale d’accélérateur, le frein moteur s’ajoute aux frottements naturels de la voiture (ceux qui restent toujours là, même en roue libre au point mort). Le moteur fournit alors un couple résistant et prélève de l’énergie cinétique à la voiture avec une puissance d’autant plus grande que le régime moteur est plus élevé. C’est pourquoi lorsqu’on rétrograde, le frein moteur est plus important (plus le régime moteur est élevé, plus les frottements sont grands). C’est pourquoi aussi, si on souhaite minimiser sa consommation de carburant, le frein moteur n’est jamais avantageux sur un trajet global.
Estimation de la puissance du frein moteur
Sur une route bien horizontale, on mesure la durée pour passer de 40 km/h à 30 km/h avec ces conditions :
– en roue libre (point mort). Seuls les frottements naturels de la voiture la font ralentir (dissipation de l’énergie cinétique). On peut négliger les frottements aérodynamiques vue la faible vitesse de la voiture. Il n’y a donc que les frottements solides
– en frein moteur (en 3ème par exemple). Le frein moteur s’ajoute aux frottements solides de la voiture.
Puissance du frein moteur en 3ème
L’exemple ici est une Mazda 6 année 2005 diesel MZR CD 120.
En roue libre (point mort), on mesure 15 secondes environ.En 3ème (frein moteur), on mesure 5,5 secondes environ.
Le régime moteur varie alors de 1500 tours/min (40 km/h) à 1100 tours/min environ (30 km/h).
Pour être le plus précis possible dans ces mesures, il faut répéter l’expérience une bonne dizaine de fois et faire la moyenne des résultats trouvés. La route est être droite, et bien sûr horizontale et sans circulation (histoire de ne pas devoir freiner à cause de quelqu’un devant).
Estimation de la puissance moyenne du frein moteur
De façon générale, la puissance moyenne P est donnée par :
P = variation d’énergie cinétique / durée
Pour l’exemple de la Mazda 6, la masse totale, conducteur et pièces en rotation compris est de m = 1530 kg.
L’énergie cinétique (Ec = 1/2 mv²) de la voiture à 40 km/h est de :
Ec (40 km/h) = 0,5 x 1530 x (40 / 3,6)² = 94,4 kJ à 40 km/h
L’énergie cinétique de la voiture à 30 km/h est de :
Ec (30 km/h) = 0,5 x 1530 x (30 / 3,6)² = 53,1 kJ à 30 km/h
Pour le détail du calcul :
L’énergie cinétique d’une voiture
Situation 1 : roue libre
En roue libre (point mort), la durée est de 15 secondes. Le moteur est débrayé, il tourne « dans son coin » et n’intervient pas sur la mesure. On pourrait imaginer de couper le moteur et de rester en roue libre, le résultat serait identique. La puissance moyenne des frottements (majoritairement solides, minoritairement aérodynamiques vu la faible vitesse) vaut :
P = (94,4 – 53,1) / 15 = 2,75 kW
Les frottements ont une puissance de 2,75 kW environ. On peut considérer que pour maintenir une vitesse stabilisée de 35 km/h en terrain plat, c’est-à-dire compenser les frottements, il faut fournir 2,75kW (3,7 CV environ). Eh oui, il faut moins de 4 CV pour rouler à 35 km/h, mais 2750 W, c’est aussi déjà l’équivalent de plus de 180 ampoules de 15 W allumées toutes en même temps !
Puissance nécessaire pour maintenir 35 km/h : 2750W
Beaucoup ou pas beaucoup ? Peu pour une voiture, mais beaucoup si on pense qu’éteindre une seule ampoule fait une grande économie !
Situtation 2 : frein moteur de 3ème
En frein moteur de 3ème, la durée est de 5,5 secondes. Le moteur prélève de l’énergie cinétique à la voiture. La puissance moyenne totale des frottements (prendre en compte le frein moteur) vaut :
P = (94,4 – 53,1) / 5,5 = 7,51 kW
On déduit donc la puissance moyenne du frein moteur en faisant la soustraction :
Puissance du frein moteur = 7,51 kW – 2,75 kW = 4,76 kW
A un régime moteur moyen de 1300 tours/min, la puissance du frein moteur est de 4,76 kW. Lorsque l’injection est coupée, il faut 4,76 kW pour entraîner le moteur à 1300 tours/min.
Couple résistant du frein moteur
On peut calculer le couple résistant qu’offre le frein moteur autour de 1300 tours/min.
La puissance est égale à :
Puissance = couple x régime
D’où :
couple = Puissance / régime
En automobile, on compte couramment en tours/min plutôt qu’en radian par seconde, on a la conversion suivante :
Puissance (W) = Couple (Nm) x Régime (tours/min) x 2Pi/60
Pour le couple résistant du frein moteur, avec 1300 tours/min et 4,76 kW :
Couple (N.m) = Puissance (W) / Régime (tours/min) x 60/2Pi
Couple (N.m) = 4760 / 1300 x 60 / 6,28 = 35 Nm
Autour de 1300 tours/min, le couple résistant du frein moteur est de 35 Nm environ.
Frein moteur, couple résistant, nul et max
Avec la pédale d’accélérateur, on peut créer toutes les situations d’échange de puissance entre moteur et voiture.
Situation du moteur : du frein moteur au couple max
Lorsqu’on n’accélère pas du tout, on est en frein moteur. Le couple résistance est d’environ 35 Nm ici.
Le couple max correspond à la situation où on accélère à fond. Et entre les deux ?
Plus on enfonce l’accélérateur, plus il y a de carburant injecté, plus le moteur fournit un couple important. Mais il faut déjà vaincre le frein moteur avant de fournir un couple moteur à la voiture.
La valeur 0 (couple nul) correspond au point subtil où on dose l’accélérateur de façon à tout juste compenser le frein moteur. Aucun couple ne passe alors par la boite de vitesse et l’embrayage. Disons que le moteur n’apporte aucune puissance à la voiture, mais n’en prélève pas non plus. On pourrait débrayer, cela ne changerait rien à la situation où aucun échange de puissance n’a lieu entre moteur et voiture. A ce moment là, rouler au point mort serait identique, sauf que le moteur, dans son coin isolé, tournerait à un régime plus faible, consommant ainsi moins, gaspillant moins de carburant inutile. C’est d’ailleurs là tout l’intérêt de rouler en roue libre dès qu’on peut, à condition d’anticiper davantage sa conduite. Si rouler en roule libre vous oblige à freiner ensuite, c’est perdu ! Chaque freinage est pure perte d’énergie cinétique !
Frein moteur ou point mort
En frein moteur, l’injection de carburant est coupée et la consommation est de 0,0 L/100km. Mais contrairement à ce qu’on pourrait croire, ce mode de conduite n’est pas avantageux pour la consommation moyenne de carburant sur un trajet. Il est vrai qu’en frein moteur, la consommation est tout à fait nulle, mais on ne fait que déplacer le problème. C’est la voiture qui entraîne le moteur et il a bien fallu du carburant pour donner la vitesse à la voiture. Le frein moteur mange le capital d’énergie cinétique de la voiture, acquis au prix que vous payez à la pompe.
En roue libre, le moteur consomme le moins possible, au régime le plus faible. Il s’attaque à votre réservoir (0,5 à 1 L par heure seulement), mais sans prélever de votre vitesse inutilement. Ce qui change quand on adopte la roue libre, c’est le régime moyen du moteur, plus faible que sur un scénario de frein moteur.
Consommation horaire au ralenti
Ce n’est pas parce que momentanément, on consomme 0,0 L/100km qu’il y a un avantage global à pratiquer le frein moteur. De la même façon que si on ne fait pas ses courses le dimanche, ce n’est pas qu’on ne mange rien, mais qu’on puise dans le réfrigérateur !
Consommation d’une dépense faite la veille : non, ce n’est pas gratuit pour autant
En fait, tout ce qu’on gagne en frein moteur, c’est de ne pas consommer le ralenti, mais on prélève une plus grande puissance à la voiture vu que le régime moteur est plus élevé que le ralenti. Lorsqu’on fait du frein moteur à bas régime, à peine plus élevé que le ralenti, l’avantage de la roue libre devient quasiment inexistant, mais à haut régime, le frein moteur prélève beaucoup trop de puissance !
Evidemment, il ne s’agit que d’un raisonnement énergétique qui ne tient pas compte des pentes et des situations de conduite. En forte descente, le frein moteur est impératif ! Le but est alors de dissiper un maximum de puissance sans trop user et faire surchauffer ses freins !
Pour davantage de détails, voir cet article avec un exemple chiffré :
Frein moteur ou point mort : quoi choisir
Frein moteur ou point mort : exemple expliqué
Mot de la fin
Il est possible d’estimer la puissance et le couple résistant du frein moteur. A ne pas négliger, le frein moteur prélève une puissance importante à la voiture, environ proportionnelle au régime moteur. Lorsqu’on souhaite perdre de la vitesse rapidement (freiner), on a intérêt à rétrograder, mais sinon, la roue libre et l’anticipation sont à suivre pour réduire sa consommation de carburant, mais cela demande un entraînement à cette pratique, sous peine d’être plus dangereux qu’autre chose.
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